Un rapport de la Cour des comptes publié lundi effleure l’idée que les salariés puissent déclarer leurs arrêts de travail de courte durée eux-mêmes au lieu de bloquer un rendez-vous chez un médecin.
Un rapport suggestif de la Cour des comptes
La Cour des comptes vient de publier un rapport qui pourrait bien bouleverser les habitudes en matière de gestion des arrêts de travail. En effet, cette institution propose que les salariés puissent eux-mêmes déclarer leurs arrêts de courte durée. Cette initiative vise à alléger les charges administratives des médecins et à fluidifier l’accès aux soins pour des cas plus graves.
Selon le rapport dévoilé lundi 13 mai et relayé par Les Échos, établir des certificats médicaux ne constituerait pas une tâche « strictement médicale ». Autrement dit, les médecins consacrent une part non négligeable de leur temps à des tâches administratives qui pourraient être éliminées. Les délais moyens pour obtenir un rendez-vous médical s’allongent, souvent au détriment des patients ayant besoin de soins urgents.
Expériences internationales : succès et limites
La Cour des comptes n’a pas émis cette proposition sans s’appuyer sur des exemples concrets. En effet, plusieurs pays ont déjà expérimenté l’auto-déclaration des arrêts de travail. Par exemple, au Royaume-Uni, cette pratique est en vigueur depuis 1969 dans le secteur industriel. Les experts britanniques notent qu’aucun abus substantiel n’a été détecté et que la répartition des absences auto-déclarées se fait plus uniformément sur l’ensemble de la semaine par rapport à celles validées par un médecin. Les succès observés outre-Manche pourraient donc servir de modèle pour la France.
Le Québec suit également cette voie, avec des retours plutôt positifs bien que certaines réserves existent. En effet, même si l’auto-déclaration ne semble pas générer de graves abus, la Cour des comptes estime qu’un cadre plus strict est nécessaire pour éviter toute dérive.
Mécanismes de régulation et précautions
Concernant les mesures de prudence, la Cour des comptes recommande l’adoption de divers mécanismes de régulation. Parmi eux, l’établissement d’une durée de carence qui serait définie au niveau des entreprises ou nationalement. Concrètement, une ou deux journées d’arrêt auto-déclarées ne seraient pas indemnisées afin de limiter les abus potentiels. La Cour des comptes suggère également d’instaurer des systèmes de contrôle pour surveiller les potentielles dérives.
Ce n’est pas la première fois que l’idée de durcir les règles relatives aux arrêts de travail est évoquée. Le gouvernement français avait déjà introduit des mesures restrictives dans le cadre du projet de loi de financement de la Sécurité sociale pour 2024. Notamment, la durée des arrêts prescrits via téléconsultation a été réduite à trois jours, sauf s’ils émanent du médecin traitant.
Contexte budgétaire et besoins de réforme
Il est important de rappeler que ces propositions s’inscrivent dans un contexte de tensions budgétaires. L’augmentation du nombre d’arrêts de travail prescrit en 2022 (8,8 millions) et leur coût exorbitant pour la Sécurité sociale (16 milliards d’euros) ont conduit le gouvernement à prendre des mesures drastiques. L’Assurance maladie, quant à elle, a pressé les médecins de limiter leurs prescriptions d’arrêts de travail.
La cour des comptes estime que l’auto-déclaration pourrait être une solution viable pour réduire ces coûts tout en optimisant le temps consacré aux consultations médicales. Non seulement cela désengorgerait les cabinets médicaux, mais cela pourrait aussi permettre une meilleure prise en charge des patients souffrant de pathologies sérieuses.
Perspectives et interrogations
Malgré les avantages apparents, la mise en place de l’auto-déclaration des arrêts de travail pose plusieurs questions. Quel serait l’impact réel de cette mesure sur le système de santé français ? Les entreprises seraient-elles prêtes à adopter ces nouvelles pratiques sans compromettre la santé et le bien-être des employés ? Quel serait l’avis des syndicats et des représentants du personnel sur une telle réforme ?
Ces interrogations méritent d’être soulevées alors que la France pourrait envisager des tests pilotes pour évaluer l’efficacité d’une telle mesure. À l’aune des témoignages internationaux et des besoins spécifiques du système de santé français, cette proposition innovante pourrait-elle trouver sa place dans notre organisation ?